L’Amante Anglaise (Marguerite Duras)
Le 8 avril 1966 on découvre en France, dans un wagon de marchandises, un débris de corps humain. Dans les jours qui suivent, un peu partout, en France et ailleurs, dans d’autres trains de marchandises, on découvre d’autres débris. A part la tête qui n’est pas retrouvée, la reconstitution du corps est faite à Paris, c’est celui d’une femme. La Première Brigade Mobile de Paris qui mène l’enquête permet de découvrir, grâce aux recoupements ferroviaires que tous les trains qui ont transporté les débris de ce corps sont passés – quelle que soit leur destination – par un même point, à savoir le Pont de la Montagne Pavée, à Viorne, circonscription de Corbeil.
Très vite, la commune de Viorne, 2500 habitants, 75 Portugais, investie de fond en comble par la police, livre son dépeceur de cadavre, une femme, Claire Amélie Lannes, 51 ans sans profession, ressortissante de Viorne depuis 20 ans, depuis son mariage avec Pierre Lannes. Claire Lannes avoue son crime dès qu’elle se trouve en face de la police. Elle a assassiné sa cousine, Marie-Hélène Bousquet, sourde et muette.
Un homme qui pourrait être un policier, un psychologue, un journaliste s’interroge sur les raisons de ce crime et mène un entretien avec d’une part Pierre Lannes et d’autre part Claire Lannes.
La pièce :
Mise en scène : Giselle GRANGE
Directeur Artistique : Didier ALBERT
Régisseur : Alain COURMONT
Durée : 1h30.
Création : avril 2017, théâtre de Poche à Toulouse.
Comédiens :
Claire LANNES : Giselle GRANGE
Pierre LANNES : Marc-Aurèle PASTOR / Philippe CHARRON
L’interrogateur : Bernard MEYER
Le mot de la metteuse en scène :
Giselle Grange a voulu une mise en scène très sobre assistée par Didier Albert : le texte, avant tout le texte, avec la retenue et les silences qui respectent l’esprit voulu par Duras, comme en témoigne la critique ci-dessous.
«… Le public tombe dans ce malicieux piège et suit avec attention des dialogues fonctionnant comme des révélations : bien sûr, qu’on voudrait l’entendre, la raison de ce meurtre. Et l’emplacement de cette tête jamais retrouvée, on n’attend que ça ! Cette maïeutique captive et comme la majorité des artistes qui s’y sont intéressés, Gisèle Grange a choisi d’en préserver le fil, pur et nu, dans la forme minimaliste pensée à l’origine : une chaise pour l’interrogé·e et un Interrogateur debout, qui parfois s’assiéra à une table pour prendre des notes. L’ambition n’est pas de revisiter la pièce mais d’amener les spectateurs au plus près des méandres psychologiques suivis par les personnages, dans un évident souci de réalisme (plutôt qu’une poétique de la scène), avec un ton mesuré (plutôt que de périlleuses envolées, tentantes pour incarner la folie, mais que guetterait le surjeu). D’aucuns regretteront un statisme qui met pourtant les acteurs au défi, c’est là un théâtre sans béquille dramaturgique, sans quête d’effet, sans volonté récréative : rien que le texte et des personnages troués. On apprécie la gageure ».
(Extrait de la critique de la pièce publiée le 18 fev 2018 par Manon Ona, « Le clou dans la planche »)
Version intégrale de la critique : ici
L’auteur :
Marguerite Duras a toujours lu les faits divers, elle était fascinée par le fait que rien ne peut combler le « pourquoi » des meurtres, quelles que soient les raisons avancées.
L’Amante anglaise a été créée en 1968 au Théâtre de Chaillot. D’un fait divers criminel datant de 1949, Marguerite Duras avait tiré une pièce, Les Viaducs de la Seine-et-Oise, montée en 1960 par Claude Régy. Peu satisfaite de cette version, elle revient sur cette histoire et la modifie. Le roman L’Amante anglaise paraît en 1967, la pièce est représentée un an plus tard, avec Madeleine Renaud, Claude Dauphin et Michaël Lonsdale.